SUPRÊMES



Bande-annonce (VF)


Ce que j'en ai pensé : la réalisatrice Audrey Estrougo nous raconte la création du groupe Suprême NTM avec son biopic musical SUPRÊMES. Qu'on apprécie le rap comme style musical ou pas, son film retrace de façon très construite (un peu trop proprement peut-être par rapport à son thème) les débuts du rap français au travers des portraits de Didier Morville, plus connu sous le nom de JoeyStarr et de Bruno Lopes, plus connu sous le nom de Kool Shen. À ce titre, il revêt un réel intérêt pour assouvir la curiosité qu'on peut avoir par rapport à ce pan de l'Histoire musicale française.

Elle a écrit le scénario avec Marcia Romano et en collaboration avec les principaux concernés que sont les trois artistes à l'origine du groupe JoeyStarr, Kool Shen et DJ'S. Ils veillent tous ensemble à poser le contexte de l'époque en l'expliquant suffisamment pour nous donner les clefs de la situation socio-politique de la toute fin des années 80, mais sans non plus se lancer dans un aspect vraiment documentaire. Le récit se concentre plutôt sur le parcours personnel de Didier Morville et la construction du duo aux prises avec le poids de la culture du groupe des copains. Ces derniers forment une structure à la fois protectrice, mais aussi bloquante pour évoluer, car il ne faut pas se distinguer ou tenter de sortir des limites imposées par les règles de la tribu urbaine, sous peine d'être vu comme un lâcheur qui rejoint le système. Le fonctionnement de l'industrie du disque est également entraperçu dans cet itinéraire d'enfants pas si gâtés que ça par la vie au départ.

Ce sont donc ces aspects qui sont mis en avant par une écriture qui suit les étapes traversées dans le temps par les deux protagonistes principaux. Cette linéarisation du récit qui fait que le film ne sort jamais des jalons propres au genre biopic bénéficie d'une réalisation vibrante de la part d' Audrey Estrougo. Elle nous fait très bien ressentir l'énergie de cette jeunesse qui ne répond qu'à ses règles internes et qui cherche à s'exprimer par tous les moyens. Elle sait aussi rendre attachants ces gamins au-delà de leur très grande capacité à être pénibles, à tout casser, à ne rien respecter (même pas eux-mêmes). Elle soigne l'atmosphère du début des années 90 dans tous les aspects de sa mise en scène. Ses scènes de concerts nous donnent la sensation d'y être et de vivre les affrontements, les moments de bascule, les doutes, les ratés et les succès.

Afin de donner corps au duo, la réalisatrice a trouvé dans ses deux jeunes acteurs principaux d'impeccables transmetteurs de rage et d'intensité pour Théo Christine qui interprète Didier Morville (JoeyStarr) et de talent et de capacité d'apaisement pour Sandor Funtek qui interprète Bruno Lopes (Kool Shen). Ils sont le yin et le yang dans leur interprétation à l'écran. Ils forment une équipe crédible et touchante. Ils savent montrer l'évolution de leur personnage sur quelques années, notamment en termes de maturité.

SUPRÊMES raconte par sa réalisation sensible et ses interprétations investies les débuts d'une aventure musicale qui résonne encore certainement sur la scène du rap actuel. Peu importe qu'on soit fan de rap ou non, il est à découvrir pour l'histoire d'un parcours qui n'était pas gagné d'avance.



Copyright photos © Gianni Giardinelli / Sony Pictures Entertainment France


Copyright photos © Audrey Estrougo / Sony Pictures Entertainment France

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