CRASSE


Drame/Un film qui navigue habilement entre sensibilité et dégoût

Réalisé par Luna Carmoon
Avec Saura Lightfoot Leon, Hayley Squires, Joseph Quinn, Nabil Elouahabi, Cathy Tyson, Samantha Spiro, Sandra Hale, Deba Hekmat...

Long-métrage Anglais
Titre original : Hoard
Durée : 02h07mn
Année de production : 2024
Distributeur : Piece of Magic Entertainment France

Date de sortie sur nos écrans : 11 juin 2025


Résumé : Londres, 1984 : Maria, âgée de 7 ans, et sa mère vivent dans un monde bien à elles, tendre et singulier, tissé d’amour et de trésors amassés. Mais une nuit, tout bascule. Dix ans plus tard, Maria vit une vie paisible dans sa famille d’accueil quand un jeune homme plus âgé, Michael, fait irruption dans leur foyer, ravivant des blessures enfouies et brouillant la frontière entre magie et folie…

Bande-annonce (VOSTR)


Ce que j'en ai penséCRASSE est un film atypique qui parle de sujets douloureux avec une franchise rafraîchissante. La réalisatrice Luna Carmoon est également la scénariste. Elle insuffle beaucoup de force dans sa façon de dépeindre l'amour maternel. Elle situe cette histoire dans les années 80/90. Elle réussit parfaitement à montrer les occupations des jeunes à cette époque, à rendre palpable le mélange d'influence et de curiosité qu'une nouvelle rencontre pouvait provoquer, puisque le monde se limitait alors principalement à son quartier ou à sa ville, et à dépeindre une envie de liberté qui s'exprimait dans un rejet des conventions. La scénariste saisit avec sensibilité cette frontière intangible entre la réalité et la folie qui s'installe dans son récit lorsque les réminiscences d'un passé oublié reviennent titiller un quotidien sans objectifs. Elle décrit avec justesse des relations humaines qui trouvent un écho différent en fonction des âges et des intentions des protagonistes. Ce qui distingue l'écriture, qui aurait pu se contenter de ne construire qu'une chronique sociale, est que Luna Carmoon n'hésite pas à intégrer des éléments sales (d'où le nom du film) qui sont une métaphore du mal-être de son héroïne. Cela peut déranger, car il n'est pas forcément agréable de regarder ces instants peu ragoûtants, mais ils renforcent et illustrent la crise intérieure de la jeune femme sur laquelle l'histoire se concentre.

En tant que réalisatrice, Luna Carmoon nous offre une première partie de film très vibrante sur une enfance basée sur un amour fusionnel et dans un contexte hors norme. Elle filme les sensations d'une enfant face aux débordements imaginatifs de sa mère avec une grande justesse. Dans la seconde partie, elle réussit à illustrer comment la folie brouille peu à peu la réalité et nous embarque dans un voyage où nous sommes, soit des témoins extérieurs, soit nous avons une vision directe des troubles qui assaillent une jeune femme en quête de gestion des souvenirs qui resurgissent. Sa mise en scène dans des espaces restreints, que ce soit une chambre, une petite maison ou un quartier, laisse toujours de la place à l'imagination de sa protagoniste et aux moments d'évasions dans lesquels elle se glisse ici et là. La réalisatrice exprime très bien les émotions qui habitent ses personnages et met en exergue des duos de protagonistes qui ont des dynamiques différentes, mais qui fonctionnent à chaque fois très bien. Elle ne tombe jamais dans le misérabilisme et, même si ses thèmes sont douloureux, au contraire, elle construit des moments de joie et montre la force de l'amour face à la perte de prises avec la réalité.

Les actrices sont très justes. Hayley Squires, qui interprète Cynthia, la maman de Maria, a un charisme qui sied bien à son personnage. Saura Lightfoot Leon est impressionnante dans le rôle de Maria, une jeune femme qui doit lutter contre un engrenage intérieur hérité d'un passé entre amour inconditionnel et folie douce. Ses échanges avec Deba Hekmat, qui interprète Laraib, la meilleure amie de Maria, sont tout à fait crédibles. Quant à Joseph Quinn, qui joue Michael, il apporte une émotivité à son personnage qui le rend attachant, d'autant qu'à un niveau différent, Michael est, lui aussi, à la dérive, tout comme Maria.

CRASSE est un film indépendant anglais qui propose une expérience cinématographique qui aborde des sujets délicats sous une forme qui fait naviguer les spectateurs entre sensibilité et dégoût. Son héroïne avec ses ressentis à fleur de peau et l'approche affective de la réalisation en font un film à découvrir qui ne vous laissera pas indifférent.



Copyright photos ©Hoard Film Ltd

 
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